Petite rétrospective sur l’institution du chef de l’État en Estonie

Petite rétrospective sur l’institution du chef de l’État en Estonie

Depuis sa création en 1918 comme État souverain, l’Estonie a été dirigée par quatre chefs d’État : Konstantin Päts (1938-1940), Lennart Meri (1992-2001), Arnold Rüütel (2001-2006) et Toomas Hendrik Ilves (2006-2016).

La situation concernant l’institution de chef de l’État est assez confuse durant la période de la « première » République d’Estonie (1920-1940). Sa première constitution de 1920 ne prévoyait pas l’existence d’un chef de l’État. Le régime d’assemblée qui était alors instituée plaçait le parlement (monocaméral), en tant que représentant du peuple souverain, au centre des institutions étatiques. Le pouvoir exécutif, de type moniste, était aux mains du gouvernement avec à sa tête celui qui faisait office de premier ministre, appelé le « doyen de l’État » (en estonien : Riigivanem). La révision constitutionnelle de 1933 changea fondamentalement le texte d’origine et institua la fonction de chef de l’État élu au suffrage universel direct pour 5 ans avec le titre de « doyen de l’État » (Riigivanem). Cependant, la révision en question ne put entrer en vigueur suite à la décision du premier ministre d’alors, Konstantin Päts, de décréter l’état d’urgence dans tout le pays pour une durée qui fut renouvelée à plusieurs reprises. Cette période est dite « silencieuse », car l’exécutif agissait sans contrôle parlementaire ; le Parlement étant mis totalement en sourdine. Ce régime totalitaire s’acheva en 1938 avec l’établissement d’un nouvel ordre constitutionnel centré désormais sur l’exécutif aux pouvoirs accrus et dirigé par un président (à la fois chef de l’État et chef du gouvernement), élu pour 6 ans au suffrage universel direct ou, si un seul candidat venait à se présenter, par un collège électoral. Konstantin Päts fut ainsi élu Président de la République le 24 avril 1938. Étant donné qu’il était le seul candidat à la présidentielle, c’est la réunion conjointe des deux chambres du Parlement (Riigikogu et Riiginõukogu) et de l’assemblée des représentants des collectivités territoriales instituée en collège électoral qui procéda à son élection. Son mandat prit fin de façon dramatique suite à l’annexion du pays par l’URSS à l’été 1940.

La Constitution actuelle de 1992 a repris de la Constitution de 1938 l’institution du chef de l’État toujours appelé Président de la République mais s’en est éloigné à propos de son mode électoral et de ses pouvoirs. Alors que la Constitution de 1938 posait les bases d’un régime présidentialiste, la Constitution de 1992 a établi un régime purement parlementaire où le chef de l’État est plus un arbitre qu’un acteur politique (au sens décisionnel) avec pour mission de garantir l’unité de la nation, la stabilité des pouvoirs publics et l’équilibre des institutions constitutionnelles.

Rédigé par Rodolphe Laffranque

Publié dans #Elections présidentielles - 2016

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